Les sept fleurs de ma vie***
J‘ n’avais fait qu’ bouquiner quand j’ connus Aconit
Sa p’tit’ moue ses yeux verts la blondeur de Tanit
Ou le p’tit chap’ron bleu de cett’ fleur de la nuit
Ne s’rait-il pas puéril d’ chercher quoi m’a séduit
Elle était l’ clair de lune et j’ suis né Sélénite
L’ certain c’est qu’ sa voix douce et son cœur de granit
M’ont fait des hématom’ qui dur’ jusqu’aujourd’hui
Son J’ai mal obstiné cinoche ou vaginite
J’en ai seul’ment déduit qu’ les fill’ n’aim’ pas l’ déduit
Et mon Dieu ça n’ s’est guèr’ démenti par la suite
L’auror’ de ma ferveur fit offic’ de zénith
J’appris qu’après l’ coup d’ foud’ on essuie beaucoup d’ suie
Que l’ soleil du savoir fait croupir l’eau bénite
Qu’ le portail de l’amour ouvre l’ chemin d’ l’ennui
Et qu’ si l’on était sag’ on choisirait la fuite
L’amour l’amour sacré qui brille au firmament
Ah ah ah permettez que j’ m’esclaffe
Repassez tout l’ roman m’surez les bons moments
Le plus clair d’ votre amour c’est l’attente et les baffes
On veut m’ fourguer les fill’ championn’ du sentiment
Ah ah ah permettez que j’ m’esclaffe
Admettons qu’ les laid’rons s’accroch’t éperdument
Mais dès lors qu’elles ont l’ choix gravez votre épitaphe
Mal remis d’Aconit j’ai tâté d’ Datura
C’est s’ guérir des langueurs en s’ taraudant d’échardes
Et je m’ demand’ parfois si ma dam’ blanche aura
Su s’assagir un peu en prenant du carat
La mort lui allait bien mais il arriv’ qu’ell’ tarde
Datura des douleurs ma plaie mon choléra
Tour à tour chatte ou lionne ou limace ou cobra
Taciturn’ le sam’di et l’ dimanch’ si bavarde
Frigid’ l’après-midi l’ matin presque vic’larde
Tu t’ piquais d’ dédaigner la loi du voir supra
En voyage ou au port à table ou sous les draps
D’avoir sans fin ni cesse à m’ tenir sur mes gardes
Ça m’ grignotait la vie tout’ les nuits j’en cauch’marde
Mais permets-moi d’ flairer un soupçon d’apparat
En déjouant l’ pronostic tu briquais ton aura
Que souvent femm’ varie v’là l’ secret d’ la passion
Ah ah ah excusez si j’ me tords
J’ai mieux à fair’ d’ mon temps qu’épier tes variations
Non content d’ m’en miner s’il faut que j’ les adore
En tant qu’ preuv’ du prim’saut d’ l’authentique émotion
Ah ah ah excusez si j’ me tords
J’admets qu’ ma cohérenc’ relèv’ de l’illusion
Mais vos insaisissab’ croyez-moi n’ perd’ pas l’ nord
Je n’ l’aurais pas app’lée ma p’tit’ fleur de l’Annam
Ma Jusquiqui ma Jusquiqui ma Jusquiame
Mais dans l’ puits d’ son œil noir j’aurais goûté l’ trépas
Loin d’ moi la prétention d’ la nourrir d’un’ banane [d’un igname?*]
Mais le front sur son flanc j’oubliais l’heur’ des r’pas
J’ vous épargn’ la visit’ détaillée d’ ses appas
J’ les aurais tous donnés pour l’énigme d’une âme
D’un sourir’ qui m’ faisait rougir d’ mes mélodrames
C’était l’accord sans phrase et quell’ paix j’ vous dis pas
J’aurais moins jubilé si j’avais lu l’ programme
Est-c’ que ç’aurait duré ad vitam æternam
En tout cas j’étais mûr pour les épithalames
Mais sans mêm m’accorder l’ temps d’un mea culpa
Ell’ m’a largué l’ lend’main du dernier d’ ses exams
En m’ laissant sur le lit trois-quat’ lign’ pas sympa
L’amour appell’ l’amour c’est vot’ profession d’ foi
Ah ah ah permettez que j’ me moque
Laissez-moi à mon tour bâcler un’ petit’ loi
Plus intense est l’ardeur moins elle est réciproque
Si vous vous figurez qu’aimer vous crée des droits
Ouah ouah ouah permettez que j’ me moque
L’eau qui dort et sourit j’ connais rien d’ plus sournois
On s’ figur’ fair’ la planche et on coul’ comme un bloc
J’ crois bien qu’ c’est par dépit qu’ j’ai épousé Ciguë
Les bell’ ne chériss’ qu’ell’ un’ moch’ c’était plus sûr
J’ pensais qu’ell’ m’ saurait gré d’ lui offrir un futur
J’ voyais bien qu’elle avait la cervelle exiguë
Mais j’ comptais la gonfler d’injections d’ ma culture
Raisonn’ment sans bavur’ mais coupé du vécu
Ell’ se trouvait très chouett’ d’intellect et d’ figure
S’ foutait d’ mes arguties d’ ma cultur’ n’avait cure
Et m’estimait verni d’ m’offrir un si beau cul
Que n’ méritaient null’ment mon fric et mon allure
Au bout d’ cinq ans d’ galèr’ j’ me suis r’trouvé cocu
Et je n’ jur’rais mêm’ pas d’avoir ri d’ la rupture
Méfiez-vous d’ la pitié c’est un’ rosse ambiguë
Si l’aut’ s’en aperçoit c’est bien rar’ qu’il l’endure
S’il l’ignore ell’ le chang’ de déchet en ordure
L’amour tomb’ n’importe où on n’ sait sur qui ni quoi
Ah ah ah permettez que j’ me gausse
Qu’est-c’ que l’amour sinon l’ support d’ l’estim’ de soi
Ell’ pouss’ mal au soleil d’yeux moqueurs et narquois
Ceux qui font leur B.A. en choisissant un’ grosse
Ah ah ah permettez que j’ m’en gausse
Tôt ou tard ell’ les f’ra s’ repentir de leur choix
Qu’ell’ s’en sente humiliée ou s’ revoie à la hausse
Bien qu’ cett’ fleur d’un été n’ait pas atteint l’automne
Et qu’ je n’ veuill’ pas confond’ caprice et conjungo
Il faut bien consacrer quinz’ vers à Belladone
Pour rectifier mon tir et faire un distinguo
Ent’ bonheur et beauté qu’assimil’ les nigauds
Le galbe de Vénus et l’ minois d’ la Madone
De la classe et du chic avec ça loin d’êt’ conne
Tirez l’ trait perfection corrigez virago
L’ego d’ Ciguë d’ la blague à côté d’ son ego
Les rapports inégaux moi j’ vous les abandonne
J’ suis pas l’ type à rêver ma maîtresse en patronne
Ses plus vit’ ses plus haut m’ fourraient l’ vit au frigo
Dans mes bras d’ temps en temps j’aim’ bien qu’on s’ pelotonne
L’esclavag’ non merci vous pens’rez que j’ mythonne
Mais ell’ me renversait quand on dansait l’ tango
L’amour est ma prison l’amour est mon geôlier
Ah ah ah permettez que j’ me marre
Combien faut-il d’Omphal’ avant qu’ vous n’ déceliez
Sous les voil’ de l’amour la grimac’ du pouvoir
Et s’il y en a vraiment qui jouiss’ d’être humiliés
Ah ah ah permettez que j’ me marre
Moi en tout cas c’est pas comm’ ça que j’ prends mon pied
Quèqu’ morsur’ passe encor’ t’obéir va t’ fair’ voir
Vais-je achever mes jours dans l’amour d’Ancolie
Bien sûr rien qu’ d’y penser ça m’ rend mélancolique
Qu’ai-j’ donc à lui r’procher en douze ans trois conflits
Et quand j’écris conflit c’est pas d’ la s’couss’ sismique
Elle est douce et fidèl’ joviale encor’ jolie
Rien à r’dire à sa daube ou à ses ravioli
Sinon qu’ils m’ont rendu quelque peu boulimique
Quant au lit on y dort on y cause on y lit
Et j’ peux même y cloper bien qu’ ça choqu’ son éthique
La fleur du pis-aller est d’ loin la moins toxique
Et pourtant c’ poison lent dont mon cœur a pris l’ pli
J’ m’en sens tout amolli avachi aveuli
Tout’ surprise est bannie d’ ses plats et d’ ses répliques
J’ai l’estomac qui bâille et les neuron’ qu’abdiquent
Et j’ désir’ tout’ les femm’ excepté Ancolie
L’amour c’est pour la vie en scène ou en coulisse
Ouh ouh ouh permettez-moi d’ glousser
Vous m’ ressortez toujours Philémon et Baucis
Quand l’ sex-appeal décroît j’admets qu’au gynécée
On arrive à changer Nestor en Adonis
Mais ouh ouh permettez-moi d’ glousser
Si vous trouvez un mec pour draguer à l’hospice
Aimer mémé mon œil y a pas plus rar’ comm’ vice
Ptêt que l’ tomber d’ rideau s’ra moins soporifique
Dans l’ confort du caveau j’ sens comme un vent-coulis
Le printemps d’ mes vieux jours on l’appell’ra Colchique
Ma Colchique couleur de cerne et d’hallali
Ô mon dernier voyage et ma plus bell’ folie
Pouvais-j’ laisser sombrer cet ang’lot alcoolique
J’ me suis voulu son psy mais par un’ voie oblique
La thérapie a dérapé vers le délit
Que dis-j’ délit le crim’ crim’ de pédophilie
Deux mois manqu’t à l’appel et m’ voilà diabolique
Oh j’ t’ai pas fait grief d’ parapher l’ faf aux flics
Mais nous voilà passés d’ l’idylle à l’ordalie
Est-c’ que c’est en prison qu’ je f’rai mon dernier lit
Rien que d’ songer au m’nu j’en attrap’ la colique
Espérons qu’Ancolie m’enverra des colis
L’amour l’amour l’amour et vous avez tout dit
Oh oh oh permettez que j’ rigole
Quand j’ vous vois si sévèr’ pour l’amour interdit
Y a pas d’ pire enn’mi qu’ moi d’ la contrainte et du dol
Mais d’un an d’ plus ou d’ moins nous faire un’ maladie
Oh oh oh permettez que j’ rigole
Vous l’ voudriez l’ lotir mon lopin d’ paradis
L’ jaun’ de la jalousie v’là l’ vrai d’ vot’ vitriol
Datura Belladone Aconit Ancolie
Jusquiam’ Ciguë Colchique eh oui ça n’en fait qu’ sept
C’est léger pour poser à l’expert ès-fillettes
Et sur l’amour vous entonner des homélies
Quand l’ plus nul des julots compte au moins cent conquêtes
Sept seul’ment dans un’ vie j’en frissonne et pâlis
Ptêt que j’ suis mal tombé après tout c’est tout bête
Car j’ai pas mal rêvé soufflé mill’ pissenlits
Mais ai-j’ jamais choisi ell’ n’ont fait qu’à leur tête
Peut-êt’ qu’à la huitième aurait lui l’embellie
À moins que j’ n’aie pas mis l’ bon cul sur la sellette
Est-c’ que j’ suis mal tombé ou qu’ell’ sont mal tombettes
Est-ce en ell’ ou en moi qu’ gisait l’anomalie
C’est tout d’ mêm’ sept sur sept que j’ n’ai pas satisfaites
Et si j’ai siroté cett’ coup’ jusqu’à la lie
Savoir où est l’ venin au bout d’ la chansonnette
Amour égale ennui et souffrance et bêtise
Eh eh eh c’est pas mal résumé
Ça m’ disting’ des gogos qui en font une église
Mon bouquet d’ fleurs des champs est plus rare à humer
Mais j’ crains bien à la fin qu’ mon nombril m’hypnotise
Euh euh euh c’est aisé d’ blasphémer
Mais il s’rait temps d’ passer au stad’ de l’analyse
L’amour est-il un leurre ou n’ai-j’ pas su aimer?
* Il s’agit bien sûr de la breneuse banane de Ma Tonkinoise, qui ne rime pas. Igname rimerait, et peu importe qu’il donne une idée trop flatteuse des mensurations du chanteur, puisqu’elle serait évidée par l’ironie; mais l’allusion serait-elle encore perçue?