Mon âme
Mon âme est un ciel bleu qui d’un seul coup s’obombre
L’ gourdin qui chang’ d’un coup ta case en champ d’ décombres
C’est un moloss’ qui croqu’ les voleurs de laitues
L’ cancre qui des pronoms n’a r’tenu qu’ je te tue
Un samouraï manchot qui n’ song’ qu’à en découdre
La lamp’ tempêt’ posée sur un baril de poudre
C’est un assassin-né qui s’ content’ d’êt’ taquin
L’ mollusque des abyss’ devant l’quel fuient les r’quins
La pros’ de Meussieu d’ Sad’ et les vers d’ Bertran d’ Born
L’ Taureau fou qui tamponn’ la Vierge et l’ Capricorne
C’est l’ commerce indécent du sang des innocents
C’est l’embryon marqué qui rictusse en naissant
C’est du cyanur’ moulé dans un tub’ d’aspirine
L’ monstre baveux d’ l’envie qui t’ dévor’ la poitrine
L’ bourreau qui t’ pend au croc et t’occit à coups d’ scie
L’ volcan d’ l’inspiration l’éruption d’inepties
Voilà c’ que c’est qu’ mon âme ou sa superficie
Voilà c’ que c’est qu’ mon âme et l’important
C’est la hargne l’important
C’est la hargne crois-moi
Mon âme est un’ pustul’ que s’ disput’ les crapauds
Un d’ ces raisins d’ lapin dont t’as farci l’ kouglof
Un noyé qui s’ délite au fond du Limpopo
Et s’ fantasme en héros d’un’ nouvell’ d’Edgar Poe
C’est une idée foireus’ qui s’ pointe au bout d’ la strophe
Une image usinée par un gars d’ l’Oulipo
Qui s’ prend pour un poète et n’est guèr’ qu’un vieux prof
Mon âme est l’ dépotoir de tout’ les catastrophes
C’est un’ nouvell’ version d’ bombinette à neutrons
Qui t’ pulvéris’ le cœur sans mêm’ t’effleurer l’ tronc
C’est un squelett’ pourri dont on fait d’ la farine
C’est la g’lée blanch’ qui coul’ quand tu t’ press’ le citron
Tout au fond du jardin mon âme est un’ latrine
Où d’puis plus d’ cinquante ans nul plus n’ chie ni n’urine
Mais qui cultiv’ pieus’ment la mémoir’ des étrons
Et s’ réjouit en secret d’ t’en mett’ plein les narines
Voilà c’ que c’est qu’ mon âme excepté qu’ ça m’ chagrine
Voilà c’ que c’est qu’ mon âme et l’important
C’est la merde l’important
C’est la merde crois-moi
Mon âme est un’ pair’ d’œufs qui n’ voulaient pas éclore
N’ blâmez pas la maman d’ s’êt’ lassée d’ les couver
C’est un enfer de Bosch qu’un suint’ment décolore
Sur le mur d’un’ chapell’ protégée des U.V.
C’est un goss’ qui connaît tous les noms d’ dinosaures
Et r’fuse au nom d’ sa scienc’ d’apprend’ c’ que vous savez
C’est un’ tumeur létal’ qu’on choie comme un trésor
C’est un’ lettre d’injur’ signée du nom d’Yahwé
C’est c’ qui subsiste au fond d’ la valis’ de Pandore
Quand tous les maux s’en sont partis batt’ le pavé
C’est un pluviôse honteux qui s’ grime en fructidor
C’est une étoile éteint’ qui s’ la joue aux novae
C’est l’ mourant qui s’ réveill’ et souff’ ça va pas fort
Espérant qu’on l’ démente à trois pas d’ l’arrivée
C’est un fandango d’ trop au bal des métaphores
Mêm’ cell’ qui mont’ du gouffre ell’ commenc’ à m’ gaver
Voilà c’ que c’est qu’ mon âm’ si elle est pas crevée
Voilà c’ que c’est qu’ mon âme et l’important
C’est la frime l’important
C’est la frime crois-moi
Mon âme est un poids mort qui n’ me sert mêm’ plus d’ lest
C’est ce chiffon sanieux dans la rue d’ Budapest
Que t’avais ramassé pour doubler ta vieill’ veste
Va savoir si c’est lui qui t’a flanqué la peste
C’est un’ capot’ noircie qui clapote au vent d’est
Où des spermatos morts bulle un gaz qui empeste
C’est un’ pag’ délavée du reader indigeste
Un gribouillis fangeux qui s’ la joue palimpseste
Pour éluder la l’çon d’ son cont’nu manifeste
C’est un vagu’ goût d’ pituite au sortir de la sieste
C’est l’amertum’ d’un rêv dont n’ surnag’ qu’un faux zeste
L’ souv’nir de ta naissanc’ mué en présag’ funeste
C’est l’ pâl’ reflet d’un viol et l’ regret d’un inceste
Où l’on n’ distingu’ plus bien qui subit d’ qui moleste
C’est l’ soubass’ment d’ folie qui s’ refuse à tout test
C’est l’ langag’ du néant qui s’ réduit à des gestes
Voilà c’ que c’est qu’ mon âme ou l’ très peu qu’il en reste
Voilà c’ que c’est qu’ mon âme et l’important
C’est le vide l’important
C’est le vide crois-moi
[Composé en état d’ébriété sans dico des rimes, et conservé à titre de… document?? Ça pue la fin.]