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Le blog de Narcipat

La personnalité narcissique, XXXIX

30 Novembre 2010 , Rédigé par Narcipat Publié dans #Voix Autorisées (cum commento) : Otto Kernberg

     De nombreux patients limites connaissent des expériences temporaires de vide, mais elles ne sont pas si importantes que chez les patients narcissiques (limites ou non) et que chez les patients schizoïdes. Certains patients qui associent des traits narcissiques et paranoïdes oscillent entre des périodes où ils se sentent impliqués dans d’intenses réactions affectives contre de possibles ennemis qu’ils doivent repousser, mais qui leur donnent en même temps la sensation d’être en vie, et à d’autres périodes une expérience pénible de vide et de manque de signification de leur vie, lorsque les traits narcissiques prédominent, et qu’aucun ennemi proche n’est en vue. [Tiens tiens! Miroir, dis-moi que ça ne me ressemble pas! N’est-il pas cohérent, du reste, que dès que le self grandiose se risque hors de la forteresse, la paranoïa vienne à la rescousse? Il m’a toujours paru étrange de placer la persécution avant la mégalomanie, le syllogisme contraire sautant aux yeux : « Je suis extraordinaire; or on ne me reconnaît pas pour tel; c’est donc qu’on m’en veut. » Mais si je suis extraordinaire, c’est pour répondre à une dévalorisation. Quoi qu’il en soit, j’opiniâtre qu’il y a plus qu’une nuance entre ces sempiternels ennemis, ces persécuteurs du parano, et l’anéantissement psychique opéré par le rejet dédaigneux. C’est que je cuisine la parano à ma manière? Me serait plutôt avis que la vision « On me vise, on me traque » est seconde, et déjà une défense contre l’épouvante de n’être rien générée par le rejet. Bien sûr, ce n’est pas drôle, d’avoir des ennemis, surtout quand il n’y a aucune bonne foi à attendre d'eux. Mais combien pire, de mériter le mépris! Je suis plus près de la source que vous.] Pour certains patients narcissiques, le narcissisme pathologique constitue une défense importante contre des tendances paranoïdes primitives, et pour certains patients paranoïdes, la lutte contre de possibles ennemis est une protection contre l’expérience pénible du vide. [C’est vrai que ça comble, de se sentir agressé. Ce n’est pas follement agréable pour autant, surtout quand on a le dessous.] Dans tous les cas lorsque prédomine le narcissisme pathologique, l’expérience du vide représente un pôle opposé à celui du sentiment de solitude. Souvent, les patients narcissiques n’ont rien à attendre, ou ne croient pas en la possibilité d’une relation qui ait un sens et n’ont pas conscience de l’absence d’une telle relation. [Tuer toute espérance d’une relation rédemptrice, est-ce concevable? Serait-ce la guérison, ou la mort, si tant est qu’il faille les distinguer l’une de l’autre? Je me demande si Kernberg n’est pas dupe de ses patients, de leur appréciation intellectuelle des possibles, qui ne mate en rien le besoin affectif. C’est une chose de savoir que la mort est là, ou que l’âme-sœur ne viendra jamais, que la réconciliation avec les hommes relève de l’utopie, et une tout autre d’adhérer à ce savoir. Les mots, si précis qu’ils soient, tiennent la chose à distance, peut-être parce qu’elle leur est antérieure. Et je sens là, constante, la menace de l’effondrement absolu, du gouffre sans fond, auquel tout, même la mort, est bon pour échapper. Non, franchement, on ne me fera jamais croire que mon objectif ultime soit d’y choir, et le masochisme psychique le dernier mot. Et pourtant, il suffirait de s’en distraire, de ne plus penser de ce côté-là…]

 

     Tout ce que je viens de dire sur le symptôme du vide aboutit aux généralisations suivantes. L’expérience subjective du vide représente une perte temporaire ou permanente de la relation normale entre le soi et les représentations d’objet, c’est-à-dire avec le monde des objets intérieurs qui fixe dans la psychè des expériences significatives aux autres et qui constitue un élément de base de l’identité du moi. Les patients dont l’identité du moi est normale, et par conséquent, avec une intégration stable du soi, et un monde stable et intégré d’objets internes, tel qu’on le voit dans les structures dépressives de la personnalité, en sont l’illustration dans les périodes où des pressions surmoïques sévères les menacent d’être abandonnés par leurs objets internes parce qu’ils ont le sentiment interne qu’ils ne méritent pas d’être aimés. Toutefois, dans ces circonstances, l’aptitude à des relations d’objet normales persiste toujours et peut s’actualiser dans le transfert et dans les autres expériences humaines. [Un mal fou à voir les dépressions kapokiennes, par exemple, comme l’expression d’un sentiment de culpabilité. Qu’est-ce qu’elle pouvait faire chier le peuple, et au premier rang, son infortunépoux! Mais n’est-il pas assez logique, au fond, que ceux qui doutent de mériter l’amour se rendent insupportables pour le reconquérir? En soulignant bien le message, naturellement, comme quoi s’ils font souffrir les autres, c’est qu’ils Souffrent Oeufs-mêmes Superlativement. Je ne sais plus où j’ai lu qu’il n’est pas rare que les gosses qui viennent d’être adoptés dans un foyer uni avant leur arrivée fassent mille conneries pour vérifier si l’on tient à eux. Mais on dirait bien que j’ai perdu la culpabilité en route… L’autopunition ne m’est pourtant pas si étrangère que ça, surtout par sa face d’angoisse du bonheur…]

 

     En revanche, lorsqu’il n’y a pas eu d’intégration du soi, et qu’il n’existe pas de relation normale entre le soi et les objets internes et intégrés, il s’ensuit une sensation plus profondément ancrée et durable de vide et d’insignifiance du vécu de la vie quotidienne. Donc, tous les patients avec un syndrome d’identité diffuse (mais non pas de crises d’identité) ont la possibilité de développer cette expérience du vide. Cette expérience devient particulièrement vive lorsque des mécanismes actifs de dissociation primitive ou de clivage constituent la défense prédominante contre un conflit intrapsychique. Les personnalités schizoïdes, chez qui les procédés de clivage sont particulièrement intenses et peuvent conduire à une dispersion et à une fragmentation défensive des affects aussi bien que des relations internes et externes où le soi et les objets se trouvent impliqués, présentent de vifs sentiments de vide. Chez les personnalités narcissiques, où les relations normales entre un soi intégré et des objets internes intégrés ont été remplacés par un soi grandiose pathologique avec une détérioration des objets internes [Je ne vois toujours pas en quoi ça empêche l’intégration; le problème est que, ne pouvant se reposer sur ces foutus bons objets internes fondateurs, le soi grandiose est en attente perpétuelle d’aval. Peut-être la plupart des gens ne se sont-ils jamais demandé, du moins après l’adolescence, s’ils n’étaient pas des cons, des nuls, des non-étants; ce qui pourrait éventuellement expliquer que ce blog effraie, quand on y trempe le doigt : on craint la contagion.] l’expérience du vide est très intense et presque constante. Dans ces cas, le vide, l’inquiétude et l’ennui constituent une constellation de ce qu’on pourrait considérer comme une toile de fond de l’expérience narcissique pathologique. [Tout à fait exact : c’est la toile de fond. Mais on peuple le théâtre, ne serait-ce qu’avec une représentation du vide, de sorte qu’on ne le ressent plus jamais, ou par insights vite colmatés. Peut-être mon incapacité à la concentration ne recèle-t-elle pas d’autre mystère : toute insistance, toute application étant périlleuse. Il va bien falloir me tuer un de ces quatre; mais rien qu’à l’idée d’une petite minute de mort inéluctable et immédiate, je frissonne et me promets de penser à autre chose. Plus je vais, plus je me persuade que ce moment, je l’ai connu, un jour soigneusement biffé de mon enfance, où papa, sous le coup d’une de ces colères qui jaillissent du sentiment d’une mise en cause et ne respectent rien, m’aura dit ou laissé entendre : « Pusses-tu n’être pas né! » de manière à se faire croire. Voilà, qui sait, le “primal” on ne peut plus banal qui m’attend, in extremis, sur mon sommet gelé… lequel, soit dit en passant, ne le sera pas plus en janvier qu’à présent : grimpes-y donc illico, ou ferme ta gueule!] Le vide, en résumé, représente un état affectif complexe qui traduit la rupture de la polarité normale entre le soi et les objets (les unités de base de toutes les relations d’objet internalisées). Le vide est à mi-chemin entre l’espérance, la tristesse et la solitude qui représentent l’espoir du rétablissement de relations d’objet satisfaisantes d’un côté et la régression à la fusion psychotique des images totalement “bonnes” de soi et d’objet (quand on ne peut tolérer la perte de la bonne relation à l’objet) de l’autre.

 

     Dans le transfert, l’expérience subjective du vide se reflète par les vicissitudes de la relation patient-thérapeute; le thérapeute peut reconnaître, grâce à l’analyse de la situation du transfert et du contre-transfert, la nature de la pathologie des relations d’objet internalisées qui sous-tendent l’expérience du vide. Cette analyse a d’importantes conséquences diagnostiques et thérapeutiques; elle permet de clarifier la nature de la pathologie structurelle qui prédomine, ainsi que les modes de défenses impliquées. Parce que les patients qui ont une organisation limite de la personnalité et ceux qui ont un narcissisme pathologique présentent une pathologie sévère des représentations de soi et d’objet, ils nécessitent une stratégie thérapeutique particulière dans le maniement de leur transfert.

 

     Voici une esquisse de cette stratégie. À la première étape, le thérapeute doit être prévenu que l’insignifiance et la futilité sont des expériences de base qui peuvent apparaître aussi bien chez le patient que chez le thérapeute au cours des séances; il faut reconnaître cette déshumanisation de la relation thérapeutique en fonction des mécanismes impliqués (prédominance des opérations de clivage ou d’omnipotence primitive ou de culpabilité inconsciente ou d’envie inconsciente à l’égard du thérapeute, etc…) et il est nécessaire d’interpréter cette résistance contre une relation d’objet importante dans le transfert, ainsi que ses motifs.

 

     À la seconde étape, le thérapeute doit évaluer la relation d’objet primitive qui en résulte, lorsque ces défenses ont été perlaborées. Selon l’image de soi et l’image d’objet correspondante qui s’y trouvent impliquées, le thérapeute peut représenter un aspect du soi dissocié du patient et/ou un aspect d’une représentation d’objet primitive : patient et thérapeute peuvent échanger leur rôle d’image de soi ou d’objet. Il faut alors interpréter ces divers aspects du soi et des représentations d’objet et clarifier la relation humaine qui y correspond dans le transfert.

 

     À la troisième étape, il faut intégrer cette relation particulière d’“objet-partiel” jusqu’à ce que puissent être intégrés et consolidés le soi véritable du patient et sa conception interne des objets. Ces diverses étapes représentent l’essence de la séquence que l’on rencontre au cours de la perlaboration des aspects primitifs du transfert, chez les patients qui ont une organisation limite de la personnalité et chez les personnalités narcissiques.

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S
<br /> <br /> Les trois étapes "expliquées" à la fin sont totalement brumeuses parce que livrées hors contexte thérapeutique, donc inutiles à mon sens.<br /> <br /> <br /> <br />
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N
<br /> <br /> Oui, j'avoue que je n'ai copié tout cela que comme une vache regarde passer un train. Mais à la fin, êtes-vous analyste ou analysante, ex ou de l'active? N.B. que je ne vous demande pas de<br /> réponse publique.<br /> <br /> <br /> <br />