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Le blog de Narcipat

Diverses “personnalités narcissiques” : big bluff?

11 Octobre 2009 , Rédigé par Narcipat Publié dans #VA : M.F. Hirigoyen : pervers narcissique et harcèlement moral

     En fin de compte, je m’identifie assez mal au pervers narcissique, qui serait comme un petit machiavel de la narcipathologie, et c’est plutôt dans les gondoles de certains de ses cousins (pp. 168-179 de Femmes sous emprise) que je remplirais mon caddy. Comme je persiste à ne pas croire à mon unicité, et à chercher l’écho, je m’en vas vous citer sans commentaire (juré!) les passages où je me reconnais à peu près, en commençant par la personnalité narcissique dans son ensemble :

 

     « Les psychanalystes notent un accroissement des pathologies narcissiques dans leur clientèle. Ces patients consultent parce qu’ils sont angoissés ou dépressifs mais, surtout, parce qu’ils se sentent chroniquement vides. […] Les narcissiques sont prisonniers d’une image tellement idéale d’eux-mêmes que cela les rend impuissants et les paralyse. Ils ont donc en permanence besoin d’être rassurés par autrui, au point d’en devenir dépendants. Étant éternellement insatisfaits, jamais comblés intérieurement, ils réagissent par de l’agressivité, des impulsions ou des passages à l’acte violents. Ils ne sont pas demandeurs d’amour, mais d’admiration et d’attention, aussi ils utilisent le partenaire tant qu’il les valorise et le jettent, quand celui-ci cesse d’être utile. […] Tout individu normalement névrosé peut réagir avec colère face à une situation blessante, mais l’estime de soi d’un individu narcissique ne se nourrit que du regard de l’autre, sans l’autre, il n’est rien. Nous l’avons dit, il a besoin d’englober l’autre, de le contrôler, de faire de lui un miroir réfléchissant uniquement une bonne image de lui.

 

     Les personnalités antisociales ou psychopathes

 

     Dans les classifications anglo-saxonnes, ces individus sont décrits comme antisociaux, alors qu’en France on dira plus volontiers qu’ils sont psychopathes. Dans ce groupe, on trouve nettement plus d’hommes que de femmes. Étant incapables de se conformer aux normes sociales, ils ont souvent des ennuis avec la justice […] Ils se méfient de leurs émotions; chez eux, les sentiments tendres ou chaleureux sont des signes de faiblesse. Ils aiment tromper, par profit ou par plaisir, et n’hésitent pas à mentir ou tricher et à manipuler l’autre, sans aucun scrupule. […] Ces êtres impulsifs vivent dans l’instant, dans la satisfaction immédiate de leurs désirs. […] À la différence des pervers narcissiques, leur violence est avant tout impulsive, liée à une irritabilité permanente ou une agressivité à fleur de peau. Ils sont prêts à se battre à la moindre alerte. […] ces hommes sont incapables d’imaginer la douleur ou la peur chez un tiers, et, à plus forte raison, chez la femme qu’ils violentent. Inaccessibles à la culpabilité, ils n’éprouvent aucun remords et ne se remettent pas en cause. Ils ne tirent aucun enseignement de leurs erreurs passées.

     L’origine de la psychopathie serait à rechercher dans l’histoire familiale du sujet. Selon John Bowlby, « la psychopathie serait une forme de détachement extrême issue des frustrations chroniques que connaît un enfant en bas âge, lorsqu’il est contrarié dans ses besoins d’intimité et de proximité. »

     On retrouve, dans l’enfance de ces individus, soit une absence de père, soit un père abuseur. On peut considérer leurs conduites déviantes comme une adresse à un père manquant.

 

     Les “borderline” ou états limites

 

     […] Dans la vie courante, ils se présentent comme des adolescents en proie à d’incessantes vicissitudes existentielles. Ce qui domine chez eux, c’est une sensation quasi permanente de vide intérieur, d’irritabilité et de rage froide flottante. Leurs réactions émotionnelles sont intenses et instables, avec des sautes d’humeur imprévisibles et une grande impulsivité pouvant entraîner des comportements agressifs.

     Leurs relations aux autres sont potentiellement conflictuelles et ils ont tendance à décharger leur tension interne par des actes destructeurs. Toute expérience qui renvoie à une insatisfaction ou à un manque, éveille chez eux une envie de détruire l’autre et les liens qui les lient. D’une façon générale, ces individus résistent mal aux frustrations, qui déclenchent chez eux des rages ou des colères intenses et inappropriées.

 

     Très sensibles aux réactions négatives de leur entourage, ils sont très susceptibles, prompts à déceler du mépris ou de la désapprobation dans une remarque de leur partenaire et, comme ils craignent le rejet, ils prennent les devants et rejettent avant d’être rejetés.

     Au moindre affront, ils réagissent par des explosions de colère disproportionnées.

          […]

     Leur perception des autres alterne entre des positions extrêmes : soit l’autre est passionnément aimé, idéalisé, soit, s’il a eu le malheur de prendre un peu de distance ou de se montrer critique, il est violemment dévalorisé puis rejeté. Ils présentent une forte ambivalence envers ceux dont ils sont dépendants.

     […] C’est chez ce type de personnalité que l’on va retrouver les cycles de violence, tels qu’ils sont habituellement décrits. En effet, ils présentent une double personnalité : ils peuvent être charmants pendant les phases de séduction et de contrition, mais ils sont inquiétants, parfois terrifiants, lorsqu’ils laissent éclater leur violence. […] La phase d’explosion de violence n’est pas une phase dirigée directement contre l’autre, mais un moyen de décharger une angoisse interne. Le passage à l’acte joue le rôle de soupape de sécurité, de système de régulation. […]

     Ce type de personnalité se développe à un stade précoce, à partir d’expériences traumatiques de l’enfance, qu’il s’agisse de maltraitance physique ou émotionnelle ou d’abus sexuel. C’est ainsi qu’on expliquerait leur irritabilité permanente. […] Selon Donald G. Dutton, spécialiste américain des hommes violents : « Si je devais sélectionner un seul comportement parental susceptible d’engendrer la violence chez les hommes, je choisirais l’humiliation par le père. Il est clair que les pères qui humilient leurs fils ont également tendance à se montrer brutaux. » 

          […]

     Ces hommes/femmes sont en principe accessibles à la thérapie, mais leurs demandes sont très ambivalentes car ils sont tiraillés entre un cruel besoin de se faire aider et la crainte d’être rejetés ou de devenir dépendants. À la moindre frustration, ils interrompent la psychothérapie. Ils cherchent en permanence à transgresser les règles afin de mettre le thérapeute à l’épreuve. »

 

     Arrêtons-là ce petit jeu, qui semble vain et ridicule. Une mesure de pervers, une de psychopathe, deux de borderline… sans compter plus qu’un zeste de paranoïaque, plus loin? Coup de pot, d’autres traits ne collent absolument pas (le borderline : « Comme ils ont du mal à être seuls et qu’ils craignent l’intrusion, ils préfèrent le groupe de copains, la bande d’amis à la relation de couple » : gzactement le contraire de mézigue) et surtout je me heurte sans cesse à des explications niaises, à une métapsychologie déficiente. Si je ne me contente pas de glaner des traits ici et là, et si c’est le faisceau qui fait leur pertinence, alors, ne me retrouvé-je pas davantage dans l’esquisse du nerveux (Émotif-non Actif-Primaire selon feu la caractérologie d’Heymans et Wiersma) par Gaston Berger?  « D’humeur variable, ils veulent étonner et attirer sur eux l’attention des autres. Indifférents à l’objectivité, ils ont le besoin d’embellir la réalité, ce qui va du mensonge à la fiction poétique. Ils ont un goût prononcé pour le bizarre, l’horrible, le macabre et, d’une manière générale, le “négatif”. Travaillent irrégulièrement et seulement à ce qui leur plaît. Ont besoin d’excitants pour s’arracher à l’inactivité et à l’ennui. Inconstants dans leurs affections, vite séduits, vite consolés. Valeur dominante : le divertissement. » Or, stupeur! Recopiant ça comme chose avérée depuis des lustres, je m’avise tout à coup que la plupart de ces remarques pourraient laisser place à leur exact contraire, ou s’appliquer à tout le monde : l’attention des autres, qui n’en est avide? Et ne cherché-je pas, moi, plus à la fuir qu’à l’attirer? Le présent blog atteste-t-il d’une indifférence à l’objectivité, alors que je la recherche éperdument? Le mensonge est mon bain amniotique, mais ne m’efforcé-je pas d’en sortir pour enfin respirer? Suis-je si à l’aise dans la fiction, du moins dans la mienne, qui m’écœure si vite? Le goût du “négatif” n’est-il pas un faux-semblant induit par la concurrence, et, plus qu’un goût, une manière de désamorcer l’angoisse? Peut-on travailler plus régulièrement que je ne me contrains à le faire? Deux heures du mat à table, inspiration ou non… Vite consolé, peut-être… s’il y avait du rechange : en l’état, quand j’aime, c’est pour longtemps. Quant aux excitants, à part le tabac ou au sens très large… L’insignifiance menace chaque ligne, chaque mot, et il suffit de porter les yeux sur le paragraphe limitrophe, consacré au sentimental (lui, classé secondaire) pour ne plus savoir lequel choisir : « Ambitieux qui restent au stade de l’aspiration. Méditatifs, introvertis, schizothymes. Souvent mélancoliques et mécontents d’eux-mêmes. Timides, vulnérables, scrupuleux, ils alimentent leur vie intérieure par la rumination du passé. Ils savent mal entrer en relations avec les autres et tombent aisément dans la misanthropie. Maladroits, ils se résignent d’avance à ce qu’ils pourraient cependant éviter. Individualistes, ils ont un vif sentiment de la nature. Valeur dominante : l’intimité. » Gulp. Ça collerait plutôt mieux à l’être sur lequel je me suis replié… lequel pourrait, du reste, paraître apathique (nÉ-nA-S) quand on ne lui piétine pas les cors, ou colérique (É-A-P) dans un dîner, voire Passionné (É-A-S) si l’on veut bien penser à la multitude des Napoléons qui ont manqué leur coup…

     Le gros défaut de cette caractérologie, à mon avis, c’était de négliger, voire de scotomiser la relation avec autrui, qui me semble le moteur d’un caractère. Et l’on trouvait presque miraculeux de la voir comme souterrainement déduite des trois paramètres Émotivité-Activité-Retentissement. Dans Femmes sous emprise, l’impact des conduites est le premier critère de classement, et cela ne change rien au résultat, à savoir l’impression qu’on nous fabrique des types plus ou moins bidons, avec des traits glanés çà et là, et qui, à divers degrés d’intensité, se retrouvent chez tous les hommes. Est-ce que la simple question : « Suis-je un pervers narcissique? » ne cédait pas à la facilité de classer au lieu de comprendre, c’est-à-dire de prendre ensemble et de relier les éléments? Bien sûr, je résous pas mal d’inadéquations si j’ajoute la dimension de l’inhibition et du retour sur soi, qui n’est pas précisément le point fort de ces braves borderline, sociopathes ou autres paranos : l’acte violent m’est fermé, comme à peu près tout acte, et le pis que je puisse faire, c’est d’écrire un blog, protégé par l’anonymat; mais un borderline inhibé, ou un parano-qui-doute, est-ce que ça présente encore un sens? D’autre part, le soulagement mêlé de panique que j’éprouve à me voir cerné d’avance, et donc, moi qui n’existe pas par le désir et la jouissance, à être par le regard d’un psy-théoricien, relève lui-même de la pathologie narcissique. Est-ce que ces prétendus raccourcis m’ont fait avancer d’un pas? Ça m’étonnerait. Ils ne font faire l’économie d’une investigation qu’au prix d’une distorsion.

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