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Le blog de Narcipat

Un racket qui “explique tout”?

31 Juillet 2018 , Rédigé par Narcipat Publié dans #VA : X & Y : La Dette pour les Nuls

 Annexe 2

 

Sur le blog d’Étienne Chouard

 

    Le mardi 1 mai 2007, Étienne Chouard […] écrivait sur son blog :

    « Je suis en train de découvrir le détail d’une situation financière incroyable.

    Vous croyez que la monnaie est créée par l’État? Vous vous trompez : ce sont les banques privées qui créent la monnaie, et qui en perçoivent le prix (l’intérêt).

    Si c’était l’État qui créait la monnaie, il pourrait l’investir directement lui-même (sans devoir payer le moindre intérêt jusqu’au remboursement); il pourrait aussi prêter cette monnaie nouvelle aux banques (charge à elles de la prêter à leur tour) et en percevrait le premier intérêt (des milliards d’euros), ce qui pourrait aussi financer les services publics, au lieu de garnir des poches de soie au prix d’un déficit paralysant pour l’État.

    L’État (c’est-à-dire nous tous) a perdu le droit de battre monnaie, et ce sont les banques privées à qui nos soi-disant “représentants” ont abandonné ce pouvoir décisif.

    Vous pensez que la monnaie est un outil qui sert l’intérêt général? Vous vous trompez : la monnaie est devenue (discrètement) un outil qui sert d’abord aux intérêts privés.

    La construction européenne pourrait bien être motivée principalement par le détournement de la richesse publique, notamment à travers l’article 104 du traité de Maastricht : « Il est interdit à la BCE et aux banques centrales des États membres, ci-après dénommées “banques centrales nationales” d’accorder des découverts ou tout autre type de crédit aux institutions et organes de la Communauté, aux administrations centrales, aux autorités régionales ou locales, aux autres autorités publiques, aux autres organismes ou entreprises publics des États membres; l’acquisition directe, auprès d’eux, par la BCE ou les banques centrales nationales, des instruments de leur dette est également interdite. »

    Par cet article (repris quasiment tel quel dans le TCE, art. III-181 rejeté en 2005 par référendum [1]), les États (c’est-à-dire nous tous) ne peuvent plus financer les investissements publics qu’en empruntant à des acteurs privés, et en leur payant un intérêt.

 

    Et il ajoutait :

    « Cette prise de conscience m’a conduit à écrire un billet à Judith Bernard, sur le Big Bang Blog [2], qui s’inquiétait du sort des services public et de leur financement prétendument problématique (d’après nos représentants politiques). […] Avec le contrôle de l’argent, on est au cœur du problème des hommes avec le pouvoir : ça vaut le coup de lire pour comprendre. Les citoyens sont fous de ne pas approfondir personnellement cette cause majeure de leur travail forcé. »

    Voici quelques extraits de ce billet sur Big Bang Blog :

    « D’abord, merci pour tout : d’ordinaire silencieux, je savoure vos textes, forts et beaux, dans mon coin, comme on goûte du lait au miel.

    Ceux qui vous maltraitent cette fois, en faisant comme si vous étiez à la fois utopique et irresponsable à tant apprécier la dépense publique sans vous soucier des financements, ceux-là se trompent : nous n’aurions aucune peine à financer TOUS les investissements utiles à notre collectivité si nous avions le contrôle de notre monnaie, au lieu de l’avoir – c’est proprement incroyable – abandonné aux banques privées.

    Ceux qui vous vilipendent font comme si la monnaie était forcément rare. Ils vous enferment ainsi dans une économie de rareté. Mais cette rareté est artificielle, elle est voulue, elle est fabriquée, et elle est à la source de la richesse immense de certains acteurs qui savent rester discrets.

    Bien sûr, la monnaie est rare, elle est chère et son prix s’ajoute aux prix de toutes choses; les échanges sont pénalisés par le coût des crédits.

    Or il se trouve – vous n’allez pas me croire – que les États ont abandonné la création monétaire aux banquiers privés. Les États (c’est-à-dire nous) ne pourront plus créer la monnaie dont ils ont besoin pour fluidifier l’économie. Quand l’État (c’est-à-dire nous) a besoin d’argent (pour construire des hôpitaux ou des crèches), il doit aujourd’hui emprunter cet argent aux acteurs privés et leur payer un intérêt, au lieu de créer lui-même l’argent dont il a besoin. C’est idiot. Non, c’est criminel. En tout cas, ce n’est pas une fatalité : c’est un choix politique et un choix qui n’a rien à voir avec l’intérêt général.

    Quand une banque vous prête 100000 euros, elle ne les a pas nécessairement. Elle peut les créer (par une simple écriture) pour vous les prêter, et elle les détruira quand vous les lui rendrez. Mais, au passage, elle aura perçu un intérêt (considérable) qui ne correspond à aucun service, aucune privation de sa part : l’intérêt que perçoivent les banques privées sur la monnaie qu’elles ont le droit de créer est foncièrement injuste, une sorte de paiement de l’indu, un racket gigantesque de toute l’économie par des acteurs privilégiés.

    Quelle est la raison de ce sabordage monétaire qui asphyxie notre économie? Une volonté politique. Un phénomène réversible, donc. Il ne tient qu’à nous de récupérer notre souveraineté monétaire.

    Tous les citoyens devraient prendre quelques heures pour étudier l’histoire du racket financier imposé par les banques (en France, en Europe, aux États-Unis) : ils comprendraient les solutions qui s’imposent, à la fois simples et fortes : la création monétaire doit impérativement et exclusivement relever de la puissance publique.

    Ne croyez pas les épouvantails et autres chiffons rouges qu’on va agiter devant vos yeux pour vous persuader que l’État créateur de monnaie est forcément imbécile : de bons contrôles sont évidemment imaginables pour que la création publique de monnaie soit raisonnable. Ce qu’on appelle la “planche à billets” n’est pas forcément une catastrophe, bien au contraire, c’est le sens de mon message : c’est l’abus de la planche à billets qui est une catastrophe, OK; mais son utilisation raisonnable est non seulement utile, mais indispensable pour un bon fonctionnement de l’économie. Ceux qui prétendent le contraire ont souvent une idée derrière la tête et pas seulement l’intérêt général en ligne de mire.

    D’ailleurs, la masse monétaire augmente d’environ 10% tous les ans sans déclencher d’inflation, ce qui est bien la preuve que ce spectre de la planche à billets n’est qu’un épouvantail (bien commode pour nous conduire à accepter que l’État soit dépouillé de ce droit essentiel).

    Par contre, les banques privées devenues créatrices (et vendeuses) de notre monnaie (ces banques à qui on a abandonné la “planche à billets”, précisément) sont, effectivement, de véritables parasites, à très grande échelle. Rien n’impose, économiquement, que ce soit des acteurs privés qui maîtrisent la création monétaire, au contraire.

    Nous sommes fous d’accepter de perdre ce levier vital des politiques publiques, aussi bien en France qu’en Europe.

    Les soi-disant “libéraux” font tout pour ruiner les États, ce qui offrira plusieurs avantages aux acteurs privés déjà très riches : une fois ruiné, l’État ne pourra plus assumer que les fonctions sécuritaires (armée, police, justice), bien utiles aux très riches (ces fonctions étatiques-là, ils y tiennent, curieusement). Une fois ruiné, l’État vendra les services publics aux copains privés des prétendus “hommes d’État” complaisants. Je vous laisse imaginer les yeux cupides avec lesquels les compagnies d’assurance lorgnent le marché du financement de la santé publique, pour s’en tenir à votre exemple. Les “libéraux” vont leur vendre tous nos plus précieux services publics.

    Si on ne se paie pas de mots en ne lisant, dans les institutions, que les préambules et les généreuses déclarations d’intention liminaires, si on va lire tous les articles en détail pour contrôler que la séparation des pouvoirs existe bien, vérifier si le contrôle des pouvoirs est effectif, surveiller l’indépendance des juges qui doit être réelle, s’assurer que l’information honnête des citoyens soit protégée et garantie, prendre garde à ce que les moyens soient offerts aux citoyens pour résister vraiment à d’éventuels abus de pouvoir, si on contrôle tout ça, Judith, eh bien c’est une catastrophe : ils ont en train de nous piquer la démocratie. Et en jurant le contraire!

    […]

    Mais le cœur de l’impuissance politique grandissante des hommes est encore plus difficile à percevoir : comme je vous le disais, la grande absente de nos débats politiques est la monnaie. Pourtant, nous pourrions satisfaire bien des besoins vitaux en reprenant son contrôle. [3]

    Il tient aux journalistes [alors là je me marre. Mais bon, c’est un courriel adressé à l'une d'entre eux] et aux citoyens “donneurs d’alerte” de faire monter le sujet sur la place publique

    […]

    Toute somme dépensée par l’État se retrouve dans ses caisses au bout de quatre ou cinq ans d’impôts [4], ce qui montre la bêtise des politiques frileuses réclamant un État pingre, et que cet investissement a été multiplié (on parle d’ailleurs de multiplicateur d’investissement) et a répandu ses bienfaits dans des proportions immenses.

    Les difficultés financières de l’État ne viennent pas du tout de son incurie, mais de sa pauvreté artificiellement programmée à travers un système bancaire inique, un privilège de type féodal discrètement consenti aux banques privées – le droit de créer la monnaie et de prélever un intérêt sur cette monnaie neuve, et l’obligation pour l’État de s’endetter auprès des acteurs privés pour financer les besoins publics – système bancaire qui met le pays en coupe réglée, sans aucun espoir de jamais rembourser une dette sans fin puisque la création monétaire est rançonnée.

 

    Nous sommes victimes d’un sabordage monétaire de la part de nos propres “représentants” et la construction européenne permet de verrouiller ce sabordage monétaire au plus haut niveau : européen et constitutionnel. Normalement, si leur plan aboutit, aucun peuple ne pourra plus jamais s’affranchir de la tutelle du système financier privé.

    […]

    Dans l’état actuel d’affaiblissement des puissances publiques face aux multinationales privées, la protection des services publics passe, à mon sens, par une réforme institutionnelle qui rend le pouvoir aux peuples, pouvoir nécessaire pour défendre eux-mêmes les services auxquels ils tiennent, et cette réforme n’est possible que si l’assemblée constituante n’est pas composée d’hommes de partis car les partis ont un intérêt personnel [ou groupal?] à l’impuissance politique des citoyens, ce qui explique qu’ils ne nous donneront jamais le pouvoir qui nous est dû. Cela vaut pour la France comme pour l’Europe. »

 

[Résumé vigoureux. Je ne suis pas encore parti à la recherche des contradicteurs de cette thèse, s’il en est (il est plus commode de la passer sous silence ou de lâcher un peutt peutt style « mythe urbain » ou « théorie du complot »), mais pour ma part, je suis convaincu sous bénéfice d’inventaire. Ce racket paraît un peu énorme, mais l’explication des trente, quarante, bientôt cinquante piteuses, gésir là – sauf que pendant ce temps-là je suis devenu, pour ma part, de moins en moins misérable, qu’à en juger par les machins que mes voisins censément démunis mettent aux “encombrants”, je ne suis pas le seul… et que je ne comprends pas, au cas où l’info serait exacte (car ceux qu'on touche ne reflètent pas nécessairement les leurs), pourquoi les taux d’intérêts sont si bas ces temps-ci : les requins deviendraient-ils raisonnables?]

 

 

[1] Ainsi que dans le Traité de Lisbonne (le “mini-traité”) s’il est adopté, dans lequel cet article 104 devient l’article 123.

 

[2] Mis en sommeil en 2007, d’après Wikipédia. Le nom a été repris, notamment par un b.b.b.b intéressant, mais dont les archives s’arrêtent à 2011.

 

[3] Le bénéfice issu de la création monétaire est appelé “droit de seigneuriage”, et il correspondait à un droit régalien.

 

[4] Sous une réserve relative à l’absence d’exportation monétaire. […]

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